Le sexisme ça s'apprend : questionner les pratiques éducatives dès le plus jeune âge
J'ai appris, par exemple, qu'en tant que fille, je n'étais pas censée me battre comme un garçon, que je devais mettre une belle robe, rester propre , coquette et calme. Un petit garçon lui ne doit pas pleurer mais savoir se défendre. Oui ces stéréotypes, ces constructions sociales sont à l'œuvre dès le plus jeune âge. Naturellement et souvent, sans nous en rendre compte, nous sommes porteurs de stéréotypes. Un petit garçon de deux ans lorsqu'il veut mettre du vernis à ongle, du rouge à lèvre et qu'il choisit une robe de princesse pour se déguiser comme sa sœur et parce qu'il trouve cela joli va vite être confronté au regard des autres. Parents, puéricultrices, frères et sœurs lui renvoient que cela n'est pas approprié pour un petit garçon. Cela ne se fait pas ! … Eventuellement c'est plus ou moins toléré quand on est tout petit. La mixité : parlons-en Plus les enfants grandissent, plus cette différenciation se renforce. Dans les activités périscolaires des écoles élémentaires, la mixité n'est pas si évidente, davantage de garçons s'inscrivent sur des activités sportives et d'extérieur alors que davantage de filles investissent la bibliothèque ou la ludothèque. Dans la cour de récréation, l'espace physique et sonore est principalement occupé par les garçons et le football, une petite fille lorsqu'elle réussit à attraper le ballon est soit une véritable guerrière, soit un « garçon manqué ». En passant, remarquons que l'expression « fille manquée » n'est pas utilisée. Les petites filles vont davantage être encouragées pour ranger, nettoyer, colorier des princesses, porter des sacs roses, s'intéresser à la Reine des neiges. Les garçons s'identifient aux héros : batman, superman. « J'ai souvent des garçons au karaoké mais là comme il y avait une proposition de sport, ils sont tous partis. Les garçons jouent à la corde à sauter uniquement parce que c'est la journée sans ballon » témoignent les animateurs . Notons que ces animateurs sont toujours très peu nombreux pour les enfants de l'école maternelle tellement marquée par son nom. Pourquoi ne pas la rebaptiser l'école de la petite enfance par exemple ? Pour les professionnels qui travaillent dans les crèches c'est encore plus impressionnant ce manque d'hommes. Quand ils sont présents, ils travaillent surtout avec les plus grands et ce sont principalement des cuisiniers ou des ouvriers de maintenance. Comme si, s'occuper d'un bébé restait une activité réservée principalement aux femmes. La notion de sexisme nous aide à mieux comprendre l'intérêt du concept de genre et donc à considérer que les différences entre les femmes et les hommes ne sont pas seulement en lien avec des différences sexuelles mais en lien avec des constructions sociales ancrées plus ou moins consciemment dès le plus jeune âge. Ces constructions sociales s'appuient elles-mêmes sur des valeurs. Et lorsque nous abordons aujourd'hui les inégalités de salaire entre les femmes et les hommes, il apparait urgent de questionner ces constructions sociales. Encore un mot en « isme », nous dirons certains ! Après le féminisme, voilà le sexisme. Que signifie exactement ce mot? C'est une idéologie qui se fonde sur l'adhésion à des croyances discriminatoires basées sur des critères de sexe. Le sexisme s'appuie, en partie, sur des stéréotypes de genre. Ce terme, apparu dans les années 1960, est donc relativement nouveau et interroge notre façon de construire notre rapport à l'autre. Sexisme et inégalités salariales Pourquoi les femmes devraient-elle travailler 77 jours de plus par an que les hommes pour avoir le même salaire ? En France, les 10% de femmes les mieux rémunérées gagnent en moyenne 3036 euros par mois alors que les 10% des hommes les mieux payés perçoivent 3892 euros. A l'autre extrémité, les 10% des femmes les moins bien rémunérées gagnent en moyenne 80% de moins que les hommes. En France l'écart salarial moyen est de 24% selon l'Institut National de la statistique et des études économiques. Et lorsqu'on compare les rémunérations à conditions équivalentes ( secteur, temps plein, âge) il reste un écart de 9,9%. Pourtant 31,3% des femmes de 25 à 34 ans ont un diplôme supérieur à Bac +3 contre seulement 26, 4 % des hommes. Si les changements continuent à ce rythme en France ce n'est qu'en 2186 que la parité économique entre les hommes et les femmes sera atteinte. Je ne serai plus là ! Mais en agissant dès à présent nos petits - enfants vivront peut-être eux cette évolution. D'après le forum économique mondial sur 144 pays, l'écart de salaire entre les femmes et les hommes est de 59%. Nous pensons qu'un des moyens pour réduire ces inégalités est d'agir sur les attitudes, les comportements de tous ceux qui interviennent auprès des jeunes enfants notamment dans la relation éducative, sociale et culturelle pour que les différences entre filles et garçons ne fassent plus l'objet de discrimination et d'inégalité. Certaines institutions, entreprises, associations, collectivités territoriales se sont engagés dans cette lutte pour promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes. Déconstruire les pratiques éducatives sexistes Adéquations, Expression et le groupe Egaé, en partenariat avec le Centre Hubertine Auclert, ont le plaisir de vous inviter à leur atelier : « Le sexisme ça s'apprend : questionner les pratiques éducatives dès le plus jeune âge ». A la demande de la ville de Paris et de la Région Ile-de-France, nos trois structures ont collaboré à plusieurs projets visant à mobiliser des professionnel·les de la petite enfance et des accueils de loisirs autour des enjeux d'une éducation non sexiste. Fondée sur des valeurs communes, la diversité de nos approches et expertises nous a permis d'élaborer des dispositifs d'intervention concluants et adaptables à la demande (sensibilisation, formation-action, observation participative etc.). C'est cette dynamique collaborative que nous vous invitons à découvrir le 16 Juin 2017, dans le cadre d'une après-midi aussi conviviale qu'interactive. Car si le sexisme, ça s'apprend, les pratiques éducatives qui le génèrent, ça se déconstruit! Christine Olivier, psychosociologue, directrice associée d'Expression